Le pré-verger

La complémentarité des animaux et des arbres

Vaches champ et arbres

Les modèles de pré-vergers existants et leurs organisations

Les formes de pâturage sous les arbres sont variées, selon plusieurs paramètres :

  • Le type d’élevage (bovins, équins, ovins, caprins, volailles, etc.) ;
  • Les essences d’arbres ;
  • La sélection de la ressource végétale (porte greffe et greffon pour la rusticité, la résistance, la qualité, etc.) ;
  • Le design (aléatoire, aligné, groupé, etc.) ;
  • La densité de plantation (allant de 3 000 arbres/hectare en verger classique à 30 arbres/hectares dans les pré-vergers peu denses).

Outre les paramètres techniques, l’influence des terroirs – savoirs faires, patrimoines agricoles et alimentaires – est très importante à la construction et la perpétuité des pré-vergers.

Les systèmes de pré-vergers tempérés

Les pré-vergers sont plantés principalement dans les territoires ayant des filières locales de valorisation de fruits. Les zones de présence majoritaire sont la Normandie, connue pour ses vergers de pommiers (et quelques fois poiriers) pâturés par des bovins, ou encore la Haute-Saône et ses vergers pâturés de cerisiers. Ils peuvent être comparés à la déhésa du Sud-Ouest de l’Espagne, où des porcs ibériques arpentent des forêts de chênes verts ou chênes-lièges.
Les essences fruitières implantées sont généralement des hautes tiges, contrairement aux vergers intensifiés, composés de fruitiers basse tige. Il est nécessaire de sélectionner les portes greffes et les greffons en fonction des conditions pédoclimatiques.

Les aménagements et l’organisation qui en découle

L’aménagement d’un pré-verger nécessite une réflexion importante car les cultures pérennes peuvent être installées pendant plus de 100 ans. Certains prérequis sont à respecter :

  • Favoriser des zones exposées au soleil, aérées, abritées des vents forts, peu pentues, orientées sud, sud-est ;
  • Préférer des parcelles aux sols profonds, peu riches et non hydromorphes ni compactés ;
  • Planter, dans la mesure du possible, les lignes selon l’axe Nord-Sud pour un ensoleillement homogène ;
  • Orienter ses choix d’essences et des variétés plus ou moins hautes selon les territoires, les filières, ainsi que l’élevage qui y sera associé (ou inversement) ;
  • Aménager le design de la parcelle selon ses contraintes techniques pour l’entretien et les récoltes ;
  • Identifier les investissements qui en découlent (matériel, plantation, formation, temps).

Espacements

Les écartements de plantation doivent être suffisants pour que les arbres ne se concurrencent pas, ne s’apportent pas trop l’ombre et ne favorisent pas les échanges de maladies ou parasites lors de leur arrivée à maturité. Par ailleurs, l’espace entre les arbres et les tournières de la parcelle doit permettre aux machines agricoles de circuler (minimum 7 mètres). Pour la plupart des fruitiers de hautes tiges, il est nécessaire de conserver des espacements de 10 à 12 mètres sur le rang et 10 à 15 mètres entre les rangs, soit 70 à 100 arbres/ha. Pour des essences plus hautes, telles que le noyer, il est préférable de réduire la densité de moitié. La plantation des vergers pâturés en lignes et en carrés facilite les déplacements et la mécanisation des travaux d’entretiens.

Il est cependant possible de planter les lignes en quinconce afin d’augmenter l’espace disponible pour chaque arbre, homogénéiser l’ensoleillement et éviter la création de couloirs de circulation de vents forts.

Essences

Enfin, pour l’aménagement de pré-vergers composés de plusieurs essences d’arbres, deux possibilités se présentent. Il est possible de grouper les arbres par essence pour faciliter l’entretien et la récolte. Aussi, il est intéressant de mélanger les essences sur les rangs, afin de limiter la pression sur les ressources ou encore de limiter la propagation d’une maladie dû à la monoculture.

A l’instar des pratiques agricoles complexes, les vergers pâturés ont de réels avantages agronomiques, environnementaux et économiques. Certains points de vigilance sont cependant à prendre en compte pour mettre toutes les chances de succès de son côté.

Cochons

Les intérêts du pré-verger

Grâce aux associations d’espèces, les pré-vergers présentent de nombreux intérêts.

Ils permettent notamment la création d’habitats de biodiversité (oiseaux insectivores, insectes auxiliaires, etc.) limitant les ravageurs des arbres et fruits (pucerons, chenilles, insectes piqueurs).

Par ailleurs, il y a une combinaison des productions, d’un côté l’élevage bénéficiant d’un fourrage de qualité, gérant les adventices et apportant une fumure, et d’autre part les arbres fruitiers productifs et apportant des bénéfices écosystémiques (régulation de climat, des ressources naturelles eau et sol, etc.).

Ces vergers pâturés sont économes en intrants minéraux, énergétiques et en ressource en eau par la complémentarité des ateliers : matière organique de l’élevage, enracinement profond des arbres de hautes tiges, faible besoin de mécanisation.

Les points à considérer lors de la mise en place et de la gestion d’un pré-verger

En raison de l’extensivité des aménagements, la productivité en fruits est généralement moindre et plus tardive : les vergers pâturés étant composés d’arbres de hautes tiges à faible densité, les rendements sont plus faibles que les vergers denses de basses tiges. Cependant, il est important de considérer la multiplicité des productions et l’optimisation d’utilisation des ressources disponibles sur une même surface.

Par ailleurs, selon le type d’élevage intégré au verger, il est essentiel de protéger les arbres à la plantation, mais aussi lorsque l’arbre à atteint sa maturité. Les petits animaux auront tendance à gratter le sol, abimer les racines et le collet des arbres. Les grands animaux auront quant à eux tendance à se frotter aux troncs et consommer les feuilles des arbres. Aussi, le surpâturage, le stationnement des animaux sous les arbres ou le pâturage lors de périodes très humides sont autant de facteurs pouvant abîmer les arbres à long terme (déchaussement d’arbres, tassement du sol). Il est généralement conseillé de ne pas dépasser 1,5 UGB/ha/an.

De plus, il est primordial de s’assurer de la compatibilité des productions fruitières à l’élevage. Certains animaux sont sensibles aux pommes ou au glands (équins, caprins). Il est préférable d’interrompre le pâturage quelques semaines avant la chute des fruits afin de préserver les fruits tombés, assurer la santé de l’élevage et faciliter la récolte.

Enfin, le suivi et l’entretien sont essentiels à la bonne santé et la productivité du pré-verger. Ceci demande du temps et la connaissance des pratiques à utiliser. Les savoirs faires liés à ces pratiques agricoles se sont perdus au fil des années. L’industrialisation a optimisé les vergers d’une part et l’élevage de l’autre. Le retour à ces systèmes durables est en cours mais demande de la persévérance et de la réappropriation des techniques agroforestières.

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