Valoriser le bois issu des haies agricoles

La haie agricole : quelles valorisations ?

Produire du bois bûche

Emondage de trognes pour une valorisation en bois bûche énergie

 

 

La bûche de bois constitue une source d’énergie ancestrale et est toujours très utilisée dans l’hexagone comme combustible grâce aux poêles, inserts et autres appareils de chauffage présents dans les habitations. Les haies agricoles permettent d’en produire à partir du bois obtenu lors de la taille.

La valorisation du bois de haie en bois bûche est une des voies de valorisation les plus anciennes. En effet, un agriculteur peut produire des bûches à partir des troncs ou des grosses branches récupérées à la suite d’une opération de gestion de son linéaire de haies. Cette opération peut se faire manuellement ou mécaniquement en fonction des quantités de bois bûche produites. Les bûches sont ensuite vendues ou utilisées en autoconsommation par l’agriculteur pour ses besoins en chaleur.

Pour obtenir du bois bûche, les opérations se succèdent de la manière suivante :

  1. Abattage des troncs ou des grosses branches
  2. Coupe à la longueur finale
  3. Fendage de bois
  4. Séchage des bûches obtenues

 

Produire du bois déchiqueté

Amoncellement de bois déchiqueté à la ferme Dilard.

 

 

 

 

Le bois déchiqueté, appelé aussi bois plaquette, est produit à partir du bois brut issu des opérations de gestion du linéaire de haie sur la ferme. Différentes étapes sont nécessaires pour valoriser le bois de haie sous cette forme :

  1. Taille de la haie
  2. Mise en tas des bois coupés
  3. Déchiquetage
  4. Stockage et séchage des plaquettes (opération optionnelle)

Les plaquettes pourront ensuite être mobilisées directement sur la ferme ou vendues à l’extérieur. Elles peuvent être utilisées comme combustible dans une chaufferie bois, en litière animale ou en paillage. Toutefois, les étapes de transformation varient légèrement selon s’il s’agit d’obtenir des plaquettes de bois pour de la litière animale ou pour du bois énergie.

Transformer le bois en plaquette pour le chauffage

Le bois énergie en plaquette, produit grâce à l’entretien des haies agricoles, peut servir de combustible pour la production de chauffage. Sur l’exploitation agricole, la chaudière bois plaquette peut alimenter une habitation, mais également les différents bâtiments avec un besoin de chauffage (salle de traite, atelier de transformation, poulailler, porcherie, serre…).

Même si les coûts d’installation d’une chaudière bois restent conséquents, l’agriculteur réalise des économies en produisant lui-même son combustible. Il peut aussi vendre ce combustible dans tous les secteurs disposant de ce type de chaudière, tels que les immeubles d’habitation les bâtiments industriels, le commerce ou encore l’hôtellerie.

 

Chaudière bois plaquette de l'usine Ingredia dans le Pas-de-Calais.

 

Néanmoins, en fonction des moyens de l’agriculteur, de ses priorités et de la quantité de bois dont il dispose, le bois énergie produit n’aura pas la même destination. Par exemple, les plaquettes brutes suffisent pour envoyer du bois énergie en chaufferies industrielles, alors que des plaquettes de qualité supérieure (donc séchées et éventuellement criblées et calibrées) sont attendues pour un usage en petites et moyennes chaufferies.

 

 

Transformer le bois en litière animale

Le processus de transformation du bois en plaquettes pour la litière animale est semblable à celui de production du bois énergie. Toutefois, une litière plaquette doit être parfaitement sèche avant d’être utilisée pour éviter le risque de pourriture et maximiser ses capacités d’absorption.

Les techniques d’utilisation de litière bois sont variées, allant du 100% bois ou du mélange bois/paille.

 

Litière en plaquette de la ferme Hoeffel

 

Les avantages de la litière en plaquette :

  • Plus économique par rapport à la paille en termes de temps de travail : une litière bois supporte un renouvellement moins fréquent que pour une litière paille. Une couche de plaquette peut rester 10 à 40 jours sans être renouvelée contre un paillage quotidien avec de la paille ;
  • Maintien du confort pour les animaux : l’usage de la litière bois réduit l’apparition de maladies, les odeurs ainsi que le risque de développement de pathogènes grâce à une montée en température moindre par rapport à la paille ;
  • Optimisation des apports agronomiques lors de l’épandage : la litière bois absorbe plus rapidement l’eau, augmente les taux de matière organique présente dans le sol et permet une meilleure structuration de celui-ci.

 

 

Il existe tout de même des inconvénients à l’utilisation de litière en plaquette plutôt que de paille tels que la nécessité du compostage avant épandage, la surveillance de la température en période de vêlage, le besoin de matériel de gestion spécifique, la nécessité d’être accompagné, ou le volume de plaquette nécessaire important. C’est pourquoi certains agriculteurs et éleveurs choisissent de rester sur un système paille, plus coûteux en temps et en matière première (à l’achat), ou de passer sur un système mixte avec alternances de couches de paille et de plaquette.

D’autres éléments peuvent enfin orienter le choix entre paille et plaquette, tels que les productions de l’exploitation (est-ce que l’agriculteur produit lui-même sa paille, est-ce qu’il est autosuffisant en bois ?), la conformation de son bâtiment (est-ce qu’il permet le passage de tracteurs ?), etc.

Utiliser la ressource ligneuse pour l’alimentation du troupeau

Les végétaux ligneux qui composent les haies fournissent un fourrage complémentaire à l’alimentation classique pour le bétail. L’affouragement ligneux est une pratique ancestrale probablement antérieure à l’affouragement en foin.

Les fourrages ligneux constituent des aliments de qualité pour les animaux et sont particulièrement intéressants durant les périodes où l’herbe vient à manquer ou est moins riche, comme en fin d’été par exemple. Ces aliments ont plusieurs avantages pour le bétail et les éleveurs :

  • Ils assurent une alimentation de qualité, diversifiée et avec des propriétés médicinales aux troupeaux.
  • Ils permettent de limiter les coûts d’achats d’aliments complémentaires lors de période de sécheresse en assurant une partie de la ration
Photos vaches limousines

Les parties particulièrement consommées par les bêtes sont les feuilles, les bourgeons et l’écorce de certaines essences. Ces parties peuvent être consommées fraiches, séchées ou ensilées. Attention cependant, quelques essences peuvent être toxiques pour certains animaux, il est donc important de se renseigner avant de se lancer !

Pour valoriser les végétaux ligneux d’une haie en fourrage, plusieurs options sont envisageables :

  • Tailler certains arbres en têtard pour donner à consommer les branches de l’année aux bêtes,
  • Donner les résidus de taille d’entretien aux troupeaux,
  • Faire pâturer directement certaines parties des haies aux bêtes tout en faisant attention à ne pas porter atteinte à la continuité de la haie et à la survie des arbres qui la composent.

Valoriser le bois sous forme de bois d’œuvre

On appelle « bois d’œuvre » le bois destiné à l’ameublement ou la construction. Les bois utilisés en bois d’œuvre sont souvent les bois de meilleure qualité : droits et sans nœuds, desquels on pourra sortir de belles planches une fois sciés.

Produire du bois d’œuvre en agroforesterie n’est pas facile car les arbres, plus exposés à la lumière, ont tendance à faire plus de branches qu’en forêt ce qui peut provoquer des nœuds dans le bois. De même, étant plus “rares” dans le milieu, les arbres peuvent être davantage soumis aux dégâts de certains aléas comme le gibier, les rapaces, les tempêtes.

Malgré cela, en y consacrant du temps, un agriculteur peut produire du bois de bonne qualité en effectuant régulièrement des tailles.

Deux types de tailles sont nécessaires à la production de bois d’œuvre :

  • Taille de formation : cette taille a pour but d’assurer la rectitude du tronc sur la plus grande longueur possible. Elle est particulièrement importante durant les premières années de vie d’un arbre.
  • Taille d’élagage : cette taille a pour but d’éliminer les branches basses d’un arbre au fur et à mesure de sa croissance afin d’avoir un tronc lisse sur la plus grande hauteur possible, et de limiter la présence de nœuds.

A maturité, les arbres destinés au bois d’œuvre seront abattus et sciés sur place avec une scierie mobile ou débardés pour être valorisés dans une scierie locale.

Le bois d’œuvre ainsi produit pourra être autoconsommé pour les besoins de l’agriculteur, ou être vendu pour apporter un revenu complémentaire à l’agriculteur ou ses héritiers.

Peu à peu remplacé par des matériaux moins coûteux dans les meubles modernes, le bois d’œuvre bocager était pourtant par le passé très utilisé en menuiserie et en charpenterie. Il représente une matière écologique et biosourcée.

Projet Bois Bocage Martinique

Le territoire martiniquais compte de nombreux arbres et haies champêtres qui ne bénéficient pas toujours d’une bonne gestion. L’objectif du projet Bois Bocage Martinique est à la fois d’assurer l’entretien des haies, ripisylves, arbres isolés ou encore lisières forestières existantes et de valoriser la matière qui en découle. Le projet offre une seconde vie au bois, transformé en combustible, bois d’œuvre, litière… au service de l’agriculture locale.

Dans ce contexte, notre Association coordonne la filière de valorisation et organise les chantiers. Elle accompagne non seulement les agriculteurs mais également tous les acteurs impliqués (coopératives, entreprises de travaux forestiers…). BBM vise également à apporter un appui technique et financier à de nouveaux projets de plantation en Martinique.

Pour résumer

Le bois issu de la gestion durable des haies agricoles peut être valorisé de différentes manières :

  • Valorisation du bois en énergie sous forme de plaquettes ou de bûches
  • Valorisation du bois en litière animale sous forme de plaquettes
  • Valorisation du bois en paillage pour les plantes sous forme de plaquettes
  • Valorisation du branchage et des feuilles en fourrage pour le bétail
  • Valorisation du bois en bois d’œuvre pour la construction ou l’ameublement sous forme de planches

Quel que soit le mode de valorisation que choisit d’adopter l’agriculteur, l’enjeu est de passer d’une logique d’entretien à une logique de gestion où la haie devient un atelier productif à part entière sur la ferme.  La valorisation des haies doit permettre à minima de compenser les coûts de gestion de ces structures agroécologiques, voir permettre de dégager un bénéfice supplémentaire pour la ferme afin de maintenir la présence de haies fonctionnelles dans le temps pour la résilience des fermes demain.

La haie, par ses fonctionnalités, rend de multiples services aux agriculteurs, à la société et à l’environnement qui vont bien au-delà des produits obtenus par la valorisation. Elle protège les cultures du vent et autres aléas climatiques, elle attire la biodiversité sur l’exploitation, lutte contre l’érosion, améliore la gestion des flux hydriques sur les parcelles et contribue ainsi à l’augmentation des rendements agricoles.