Collaboration Éleveurs et céréaliers

Le guide juridique d'une collaboration évidente et performante

veaux dans l'étable mangeant du foin

Le projet SARBIVOR se concentre principalement sur la valorisation, par les animaux de productions végétales externes à un élevage, la mutualisation de l’outil de travail qu’est le troupeau et la mise en commun du travail. Ainsi, vous trouverez ici une synthèse des points clés, liés aux sujets abordés dans SARBIVOR, explorés par le CASDAR CER’EL dans son guide juridique sur les complémentarités entre éleveurs et céréaliers.

 

Vous pouvez retrouver le guide complet, produit par le CASDAR CER’EL : Développer les complémentarités céréaliers et éleveurs – Guide juridique

Différents contrats de cession d’un produit agricole

Tableau reprenant les régimes contractuels de cession ponctuelle et de cession répétée selon différents contrats et leurs situations.

Les ventes, échanges, contrats d’entreprise et entraide ne peuvent pas être requalifiés en contrat soumis au statut du fermage s’ils ne sont pas répétés. La répétition peut entrainer requalification.

Tableau reprenant les risques et limites de vente, d'échanges, de divers contrats et du bénévolat

Référence : Développer les complémentarités entre céréaliers et éleveurs, CASDAR CER’EL, pages 20 à 27.

 

Commercialisation des fourrages, menues-paille et pâturage

On parle de commercialisation de fourrages, de menues-pailles ou de pâturage dans les situations suivantes :

  • Achat / vente de fourrages sur pied avec plus ou moins d’implication de l’acheteur (des travaux de cultures au seul enlèvement de la coupe).
  • Achat / vente de fourrages en bottes ou enrubannés,
  • Achat / vente de fourrages en andain, avec la charge pour l’acquéreur de faire enlever la récolte
  • Pâturage (d’un couvert d’hiver, de repousses ou d’une culture) par un troupeau sur des terres n’appartenant pas aux éleveurs ou dont un bail est détenu par l’exploitant de grandes cultures.

Ces situations ne font pas l’objet de restrictions particulières. En revanche, elles peuvent faire l’objet de requalification dans certains cas :

  • Requalification de la vente en mise à disposition à titre onéreux d’un bien à destination agricole : Cette situation peut intervenir dans le cas où l’acheteur a à sa charge tous les travaux sur sa parcelle, contre un loyer. Il ne doit y avoir aucune intervention du propriétaire (ex : entretien des haies, des fossés, travail de culture, etc.). La présomption est levée dès lors que toutes les conditions ne sont pas réunies : s’il n’y a pas de loyer, ou si la mise à disposition n’est pas totale.
  • Requalification de la vente d’herbe en bail rural : Cette situation a lieu si l’acquéreur récolte l’ensemble de la production et qu’il assume la récolte et l’enlèvement des produits. La présomption est levée si la cession des produits n’est pas exclusive et continue (ex : si une autre récolte a lieu sur la parcelle et qu’un acquéreur supplémentaire intervient). Il est cependant possible de prévoir, dans le contrat, que dès lors que l’acquéreur a suffisamment récolté pour son autosuffisance, le vendeur puisse vendre par lui-même les excédents.
  • Requalification de la prise en pension d’animaux : Ce cas de figure à lieu si un éleveur fait paître son troupeau sur une terre qui ne lui appartient pas. Autrement dit, lorsque l’exploitant habituel laisse la jouissance des terres sur une partie de l’année, par exemple pour pâturer les couverts d’hiver ou les repousses. Pour éviter cela, le contrat doit être écrit, et mentionner les périodes durant lesquelles l’éleveur peut cultiver ou venir faire paître ses bêtes. Il est conseiller de préciser que cette jouissance a lieu entre deux cultures, afin de prouver qu’il n’y a pas cession exclusive des fruits de l’exploitation. Pour rappel, les mouvements d’animaux en dehors des lieux habituels de détention doivent être consignés par écrit, ajoutés au registre d’élevage et conservés pendant 5 ans sur l’exploitation.
Référence : Développer les complémentarités entre céréaliers et éleveurs, CASDAR CER’EL, pages 12 à 14.

 

Vente de luzerne sur pied

La vente régulière de luzerne sur les premières années de plantation soulève des questions quant à sa compatibilité avec le statut du fermage, car elle pourrait entraîner une requalification du contrat de vente en bail rural. Pour prévenir cela, il est recommandé de mettre en place un contrat cadre accompagné de contrats d’application annuels, établissant ainsi une relation commerciale négociée avec des contrats renouvelés annuellement, permettant notamment de bénéficier de l’aide PAC légumineuse. Il est essentiel que le propriétaire et le preneur à bail maintiennent des actions sur les parcelles concernées pour éviter une requalification du contrat en bail rural.

Référence : Développer les complémentarités entre céréaliers et éleveurs, CASDAR CER’EL, page 15.

Mise en commun du travail

L’entraide et la banque de travail Entraide

L’entraide agricole implique des services gratuits échangés entre exploitants, pouvant être occasionnels, réguliers ou organisés. Ces services incluent le travail et le matériel agricole, sans imposition fiscale ni cotisation sociale.

L’entraide peut adopter une forme plus organisée, surtout lorsqu’elle est régulière. La mise en place d’une banque de travail est adaptée aux besoins des parties impliquées, pouvant consister en un suivi des heures travaillées pour équilibrer les relations et envisager des compensations en cas de déséquilibre significatif. Il peut aussi s’agir d’un système de points avec un tableau d’équivalences selon les activités. Par ce mode flexible de calcul des heures de travail (des hommes comme des machines) ce système complète bien le système de CUMA.

Référence : Développer les complémentarités entre céréaliers et éleveurs, CASDAR CER’EL, pages 48 à 56.

 

Risques et limites à prendre en compte :

Distinction entre entraide et bénévolat

Lorsque l’aidant est un agriculteur, l’entraide concerne les actes liés à l’exploitation ; sinon, c’est du bénévolat. Pour un aidant non-agriculteur, il ne peut y avoir d’entraide : un service gratuit est du bénévolat, sinon un contrat de travail peut s’appliquer. En cas de dommage corporel, les assurances distinguent les actes de pure courtoisie (comme un voisin aidant brièvement) couverts par la responsabilité civile délictuelle, et les contrats d’assistance tacite (amis aidant de façon planifiée) nécessitant une couverture de responsabilité contractuelle spécifique. Il est crucial de discuter de ces détails avec un assureur lors de la négociation des contrats d’assurance.

Distinction entre contrat de travail et entraide

En cas d’accident pendant l’entraide agricole, les victimes peuvent chercher à qualifier la situation de contrat de travail pour accéder à des indemnisations plus avantageuses. Cela nécessite de démontrer un contrôle du bénéficiaire et une rémunération. Les assurances des victimes peuvent être impliquées dans cette démarche pour obtenir des compensations similaires à celles des salariés en cas d’incapacité de reprendre le travail.

Distinction entre entraide et prestation de service

La distinction entre entraide et prestation de service repose sur la gratuité : l’entraide implique un service sans contrepartie monétaire, tandis qu’une prestation de service est facturée. La prestation de service est soumise à la TVA et aux cotisations sociales. De plus, cette dernière augmente la base d’imposition fiscale.

Groupement d’employeur

Le groupement d’employeurs offre un soutien en matière d’emploi ou de gestion des ressources humaines, ou fournit des services de remplacement ou d’emplois à ses membres. Il peut être composé de personnes physiques et morales et doit être formalisé par un accord écrit, pouvant prendre différentes formes statutaires, notamment une association loi 1901 ou une CUMA dans le contexte agricole.

La création d’un groupement d’employeurs, qu’il soit une association loi 1901 ou une CUMA, nécessite des démarches spécifiques. Une notification au contrôleur du travail est obligatoire, incluant des informations sur les membres, les statuts et la convention collective.

L’agrément du groupement par la DIRECCTE est crucial, avec une réponse attendue dans un mois. Le fonctionnement du groupement est régi par ses statuts et un règlement intérieur, conformément à un accord collectif établi par le ministère de l’Agriculture.

Toutes ces réglementations visent à assurer une gestion efficace et juste des ressources humaines au sein des groupements d’employeurs, en protégeant les droits et les intérêts de tous les membres.

Risques et limites à prendre en compte :

Responsabilité financière et sociale du groupement

Les membres du groupement sont collectivement responsables des dettes envers les salariés et les organismes de cotisations sociales.

Contrat de travail et conditions d'emploi

Le salarié, employé par le groupement, est mis à disposition des exploitants contre rémunération des heures de travail, sous contrat écrit précisant les conditions de travail et éventuellement une zone géographique ou des limites de déplacements. Pour les activités de remplacement, le contrat de travail doit spécifier la zone géographique, les déplacements limités et les frais éventuels. Un CDD peut être renouvelé en cas d’absence prolongée du chef d’entreprise, selon les limites fixées par le Code du travail. Les groupements d’employeurs visent à stabiliser l’emploi en proposant des contrats à durée indéterminée, à temps plein ou partiel.

Partage de responsabilités envers le salarié

La responsabilité envers le salarié est partagée entre l’utilisateur et le groupement d’employeurs, qui doit garantir les revenus du salarié. Le salarié doit bénéficier des mêmes avantages que les employés de l’utilisateur (primes, treizième mois, épargne salariale). Le groupement est également chargé des relations avec la médecine du travail.

En principe, le salarié, rémunéré par le groupement, n’est pas affecté par la défaillance de l’utilisateur. L’utilisateur est responsable des conditions de travail du salarié sur son exploitation et doit le rajouter au registre du personnel.

 

Bénéficiaires de la mise à disposition

Les chefs d’exploitation ou d’entreprises agricoles peuvent être bénéficiaires de la mise à disposition.

Mise en commun de foncier

Assolement en commun

L’assolement en commun implique l’exploitation de parcelles par plusieurs exploitants sans créer de personne morale. En droit rural, cela se traduit par la mise à disposition de parcelles par un preneur au sein d’une société en participation.

L’assolement en commun se réalise via une société en participation (SEP), différente des autres sociétés, où il s’agit d’une mise à disposition du bail en vue de l’exploitation à travers une société. La SEP constitue une société sans personnalité morale, où chaque exploitant conserve son indépendance. Les parties impliquées peuvent être des personnes physiques, des personnes morales associées sans restriction, ou des sociétés, immatriculées ou non, avec un objet principalement agricole. Les statuts de la SEP ont un effet limité entre les parties et ne sont pas publiés comme ceux d’une société enregistrée. Le preneur reste responsable de l’exécution du bail vis-à-vis du bailleur, et il est crucial de communiquer toutes les obligations liées à la culture aux co-associés. Le fonctionnement de la société est libre, mais les associés doivent respecter les engagements pris individuellement pour l’exploitation des parcelles louées.

Les associés désignent un gérant chargé de représenter la société et de passer des actes en son nom. Les parts sociales sont cessibles mais non variables, et les modalités de retrait, de cession et d’entrée dans la société sont définies par les statuts.

Référence : Développer les complémentarités entre céréaliers et éleveurs, CASDAR CER’EL, pages 68 à 75.

 

Risques et limites à prendre en compte :

Conséquences en cas de manque d'informations du bailleur

Si le bailleur subit un préjudice en raison d’un manque d’informations quant à cette mise en commun, il peut demander la résiliation du bail. De plus, le bailleur peut utiliser ce motif comme base pour ne pas renouveler le bail, en donnant congé au preneur au moins 18 mois avant son expiration.

Caractéristiques de la société en participation (SEP)

La forme sociétaire de la société en participation (SEP) offre une grande souplesse, peu d’obligations légales et une liberté d’aménagement et de modification. Cependant, elle ne permet pas la représentation des membres, l’emploi de main-d’œuvre temporaire ou la détention de matériel en propre.

Fiscalité des revenus générés par la SEP

Concernant la fiscalité, les revenus générés par la SEP peuvent être soumis à l’impôt sur les sociétés (IS), payés par le gérant. Alternativement, ils peuvent être soumis au régime de l’impôt sur le revenu si tous les participants sont connus de l’administration fiscale.

Échange en jouissance

L’échange de terres doit viser à améliorer l’exploitation du foncier. La formalisation de l’échange nécessite la rédaction d’un acte en jouissance, avec l’assistance d’un conseiller ou d’un notaire.

Pour un échange en jouissance, il est nécessaire de rédiger un acte spécifique et d’informer les bailleurs par lettre recommandée avec accusé de réception. Si la parcelle reçue en jouissance entraîne une modification de la surface totale exploitée dépassant le seuil de déclenchement du contrôle, l’opération peut être soumise à autorisation du contrôle des structures.

Risques et limites à prendre en compte :

Notification et opposition du bailleur

Il est primordial que le bailleur soit informé de tout échange par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette démarche lui permet de s’y opposer dans un délai de deux mois s’il estime être lésé.

Respect des clauses du bail par le preneur :

Le preneur est tenu de veiller au respect de toutes les clauses particulières de son bail lors de tout échange. En cas de non-respect, des sanctions peuvent être appliquées sans possibilité de recours contre ce dernier.

Démarches pour un échange ou une location :

Les démarches pour un échange ou une location impliquent plusieurs étapes. Celles-ci comprennent le conseil et la rédaction de l’acte par un conseiller ou un notaire, la notification aux bailleurs concernés, ainsi que les éventuelles formalités auprès de la DDT pour le contrôle des structures.

Responsabilités du preneur lors d'un échange ou d'une location :

Lors d’un échange ou d’une location, le preneur conserve le statut de détenteur du bail et reste le seul interlocuteur du bailleur. Il est responsable du paiement du fermage et doit effectuer toutes les démarches nécessitant l’approbation du bailleur. De plus, le preneur assume la responsabilité des manquements du coéchangiste ou du sous-locataire ainsi que des dommages causés au fond loué.

Conséquences en cas de cessation d'activité du preneur :

En cas de cessation d’activité du preneur, le bail persiste, sauf en cas de cession autorisée où le repreneur acquiert un droit grevé. Une modification de la déclaration PAC est alors nécessaire, avec le contrat écrit comme pièce justificative, pour prendre en compte les implications sur les aides agricoles. En l’absence d’information au bailleur, ce dernier peut demander les déclarations PAC du preneur comme preuve de la sous-location ou de l’échange irrégulier.